Reconnaissance de ses pairs, pas tout à fait... plutôt un message "intemporel" du jeune Patrick de 1983 à celui de 2015, le remerciant de n'avoir pas oublié de réaliser son rêve de gosse.
Avec, cerise sur le gâteau, les héros de l'époque qui sont encore là pour m'y encourager.
Le 1er janvier 1983, (18 ans) habitant le sud de Toulouse je passais une bonne partie de la nuit avec mon père près du feu tricolore de Ramonville Saint Agne à appuyer sur le bouton "piéton" (j'ai honte ...) pour que les concurrents s’arrêtent juste devant nous, petit groupe de spectateurs frigorifiés mais animés et réchauffés d'une grande ferveur populaire.
en photo : le panneau, accroché au feu tricolore, qui indiquait aux véhicules la direction de la 113, direction plein Sud !
J’ai « subtilisé » ce panneau avant de rentrer chez moi, que TSO me pardonne si les premiers concurrents égarés du rallye l'ont été dès ce feu tricolore.
Puis j'allais me coucher et dès lors j'entendais depuis le fond de mon lit, vrombir les moteurs sur la grande ligne droite de la Nationale 113 qui file vers Carcassonne et qui n'était qu'à 80 m devant la fenêtre de ma chambre.
Il me suffisait de pousser légèrement les rideaux de ma fenêtre et j'entrevoyais les minuscules faisceaux de phares qui fonçaient direction plein Sud.
Comment autant de vacarme et de puissance pouvaient être dirigé par une aussi petite lumière ? J'imaginais les poignées des gaz vissées à fond, les motards si peu protégés du froid s'enfonçant dans la nuit et bientôt la nationale 113, si proche de moi durant toute l'année, prenait cette nuit là le goût d'un vrai lointain.
Alors ni tenant plus, tard dans la nuit, je me relevais, me re équipais et enfourchais ma moto, bien décidé à suivre le premier des concurrents qui se présenterait à moi.
Je voulais moi aussi en être de cette aventure, de cette nationale 20 Africaine, sans savoir que ce serait le grand froid du "1er" janvier qui allait dans un premier temps bien anesthésier ma ferveur saharienne.
Je suis donc tombé sur Gilbert LEBRUN alias "Maya l'abeille", sur 500 XR, combinaison et casque orange et sur ce casque : 2 petites antennes d'abeille (en fait 2 petites perles oranges sur du fil de fer) que la vitesse agitait dans tous les sens.
J’ai suivi le concurrent N°53 de Toulouse à Carcassonne avec ma modeste 250 XLS...
Et là, pendant 80 kms ...l'ivresse ! l'heure de gloire !!! mon ego naissant largement surdimensionné et comblé à l’extrême ! Enfin venait la consécration de mes 6 jeunes premiers mois de permis A2, car ma moto de l'époque, avec son réservoir de 21 litres et ses quelques modestes autocollants à la gloire de la Haute Garonne, donnait l'illusion (aidée par la nuit) d'une moto préparée pour le désert africain.
Concurrent usurpateur, éblouissant et trompant de mon phare 6 volts l'engouement populaire des spectateurs de la nuit, j'avais droit aux mêmes encouragements, tapes sur l'épaule et bravos que ceux que moi même je donnais 2 heures plus tôt à mon feu rouge de Ramonville saint Agne.
Sous mon casque : tsunami de jubilation !!!!
Coller à la roue de Gilbert Lebrun N° 53 (il a fini 19ième) ne fut pourtant pas une mince affaire avec ma petite 250 cc, mais cela me procurait des ailes, identiques à celles de Maya filant devant moi et malgré le froid de ce 1er janvier "elle sentait vraiment bon le sable chaud" cette petite abeille aux antennes virevoltantes.
Il y a des images qui demeurent en vous juste vivantes parce qu’elles sont inscrites dans votre mémoire... Maya, c’est au delà de ça, car subsiste encore aujourd’hui l'émotion de cette mémoire, l’émotion de ma jeunesse…
En revanche, l'heure de la frustration devait vite sonner et là : second grand coup de froid glacial ! le retour Carcassonne - Toulouse fut nettement moins glorieux... plus aucune attention, plus un bravo, plus un salut de la foule et pour cause je n'étais plus dans le bon sens.
30 ans après, grand Méa Culpa pour cette gloire usurpée aux authentiques pilotes, car j'avoue humblement aujourd'hui que lorsque l'on me faisait de grands gestes d'encouragement depuis le bord de la route je répondais également d'un signe glorieux et conquérant de la main.
J'avais 18 ans... jeune adolescent en quête d'identité à la recherche de mes héros... et ce 1er janvier 1983, ils étaient tous là mes héros ... ces chevaliers casqués des temps modernes juchés sur leur motos à la hauteur de selle démesurée et je fus l'un des leurs... pendant 80 kilomètres.
Mon périple Paris Sète 2015 est né ce jour là je crois bien – Il m’aura fallu 33 ans pour retrouver Maya l’abeille - merci à toi, Gilbert Lebrun.
... 33 ans plus tard en compagnie de Gilbert...Maya...qui a fait 4 Dakars à moto (80/81/82/83) et les as tous terminés !! respect.
à l'époque réputé pour être le bon samaritain toujours près à relever une moto, à dépanner un pilote en cannibalisant sa propre machine, à avoir le bon mot pour relancer le moral d'un motard épuisé, il n'a pas changé - J'ai été reçu par Gilbert d'une façon admirable et j'ai fait le temps de cette rencontre un voyage dans l'histoire des Dakars d'antan comme je l'aime, celle avec un petit " h " et tellement bien agrémenté de la manière croustillante dont Gilbert raconte les choses.
Il a très aimablement accepté d'être le parrain de la seconde édition de la 2de édition du Place Port N20 -