par BabySpeed » 29 janv. 2008, 12:58
Fin février 2008, une nouvelle réunion interministérielle sera appelée à statuer sur la mise en place du contrôle technique moto, ou au moins à avancer dans un dossier qui s'annonce déjà très, très controversé. Divers pros de la branche moto se sont réunis hier lundi lors des JPMS pour un nouveau débat. Morceaux choisis.
Plusieurs professionnels de la moto, CNPA, assureurs, FFMC, étaient conviés hier à animer un débat sur le controle technique moto lors de ces JPMS 2008. Et comme on pouvait s'y attendre, la salle était quasiment comble. La question agite notre milieu depuis déjà plusieurs mois : un contrôle moto, pourquoi, sur quelles justifications, et applicable dans quelles conditions ? C'est François Blanc, journaliste, qui introduit : "Le cadre d'application du contrôle technique moto est encore flou et mal perçu, que ce soit chez les pros ou dans les ministères. En attestent les prises de position pour le moins cacophoniques chez les ministres eux-mêmes, préférant là le contrôle des gros cubes, là celui des moins de 125. Pour le moment, le calendrier peut être toujours posé, mais sera sans aucun doute des plus difficiles à tenir, ne serait-ce que parce qu'on ne sait encore rien sur l'organisation de ce contrôle sur le terrain... Et dans ce conditions, on se demande bien comment il pourrait devenir obigatoire et applicable avant 2009, voire 2010 !"
Très répandu en Europe
Le contrôle technique moto est aujourd'hui généralisé dans 9 pays européens, à la demande parfois des assureurs ou de l'état lui-même. En France, depuis 3 ans, un premier semblant de contrôle technique, caché derrière l'apparence d'un diagnostic sécurité, est proposé dans le réseau Autosur, sous la bannière Motosur. Dés lors, l'idée fait son chemin dans l'opinion, et la psychose de l'uniformisation aussi dans les plus hautes sphères de l'Etat. A tel point qu'un rapport sur la question a été commandé aux Ponts et Chaussées et vient d'être rendu public. Chez les pros, les assureurs, les concessionnaires, on s'interroge et on s'inquiète : n'est-ce pas une taxe supplémentaire qui se profile, ou une nouvelle responsabilité à endosser avec possibilité de sanction (en cas d'accident après contrôle) ? C'est évident, il faut que le contrôle s'organise, mais avant toute chose, est-il réellement justifié ? Pour l'occasion, la réponse est unanyme, en tout cas parmi les intervenants présents aux JPMS. "Selon une enquête statistique tout à fait sérieuse, moins de 1 % des accidents moto sont imputables à une défaillance technique" martèle François Blanc. Et Patrick Jacquot, de la Mutuelle des Motards, de surenchérir : "Nous avons noté que plus la moto est âgée, moins elle génère de risque d'accidents... Soit moins 50 % après quatre ans ! Sur une moto, tout est visible, les organes vitaux sont accessibles. Ca ne viendrait pas à l'idée d'un motard de partir avec des pneus complètement lisses, sans frein, etc."
Un contrôle rentable ?
Malgré tout, qui dit contrôle, dit activité et donc chiffre d'affaire. Bon nombre de professionnels n'auront pas manqué de se poser la question. Luc Forestier, du CNPA (Conseil National des Professionnels de l'Automobile, représentant les concessionnaire, agents, ateliers et autres métiers de service) se charge pourtant de tempérer leurs ardeurs : "On a déjà du mal à gagner de l'argent dans l'automobile, alors pourquoi cela serait différent dans la moto ?" Et de poser clairement le problème de l'infra structure et des compétences. "Qui investira dans un centre et s'engagera à former un technicien ? Ca nous prend déjà des années à former un bon mécano moto !" Quant à compter sur le prix du contrôle pour rentabiliser à coup sûr l'opération, rien ne parait plus incertain. Les prix constatés en Europe s'échelonnent de 7 euros (en Autriche) à 36 euros (en Allemagne). On a droit outre Rhin à un contrôle administratif (numéros de cadre, moteur, papier), de sécurité, du moteur, du bruit plus un essai routier. Et la formule est on ne peut plus rodée... car en place depuis 1951 ! On est bien loin aux JPMS d'afficher le même optimisme. Notamment, un professionnel du contrôle automobile qui avait remarqué le "centre test" installé à l'extérieur lors du dernier Mondial du deux roues souligne : "Il y en avait pour 70 000 euros de matériel. En comptant le compagnon à former et une moyenne de 300 contrôles, comment ferait-on pour rentabiliser un tel investissement ?"
Balayer devant sa porte
Bref, on ne manque pas d'argument à Lyon en ce début d'année, et l'alliance se constitue entre professionnels du deux roues contre le contrôle technique. Même les représentants du Codever expriment leur soutien à la cause du moment, les motos d'enduro n'étant pas épargnées. Un visiteur pose aussi la question des motos anciennes, souvent dotées de pièces adaptables. Eric Marot, de la Mutuelles de Motards, est catégorique : Elles ne pourront plus circuler sur route si on considère le projet de controle technique atuel !" Et que dire des Street Bike, ces sportives transformées en roadsters (souvent après une chute) ? Un concessionaire du sud expose son point de vue : "De toute façon, les autorités contrôlent de plus en plus les motos impliquées dans les accidents avec les conséquences qu'on sait ! Il faut balayer devant notre porte, car trafiquer les motos de nos clients ne fait le jeu de personne. Il faut leur expliquer gentiment, et la plupart comprennent." Plutôt que le contrôle technique lui-même auquel ils sont fermement opposés, la prise de conscience semblait donc réelle chez les professionnels conviés à ces 6èmes JPMS, celle du débat et "de devoir expliquer ce que c'est que de rouler à moto à tout échelon de la société", comme le résumera finalement le représentant de la Mutuelles des Motards. Pas sûr que l'argument convaincra le Ministère. Mais la bataille ne fait que commencer.